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05/05 - 25/06/1995 : Graveurs Tchèques

L'amateur d'art qui parcourt les galeries d'art à Prague ou quelques catalogues de gravures découvrent souvent des oeuvres tchèques techniquement très élaborées où le caractrère figuratif, voire narratif, est dominant. L'humour, la satire, l'étrangeté d'un monde non pas surréaliste mais irréel y sont fréquents. On peut donc se demander s'il s'agit là de spécificités de la gravure tchèque (tout récemment encore tchéco-slovaque) dont Anderle, Brunowsky, Kulhanek etc... ont été pendant longtemps les représentants les plus connus, porteurs en quelque sorte d'une certaine "officialité". Ou bien ne sont ce que de larges courants, qui existent sans doute mais qu'il ne faudrait pas généraliser trop vite. En effet, d'autres artistes se sont brillamment exprimés en marge de ces tendances. L'actuelle exposition a précisément voulu présenter trois de ceux-ci, en leur posant bien sûr la question de savoir comment ils se situaient dans ce contexte.

Ondrej Michalet a bien voulu se charger de répondre :

Ces trois artistes tchèques travaillent presqu'exclusivement avec le médium de la gravure. Si la notion de gravure tchèque existe, j'avoue que je n'en connais pas le contenu réel. Certes, il me vient à l'esprit de nombreux noms d'artistes, de personnalités marquantes, mais en même temps il m'est bien difficile d'en extraire un trait commun les caractérisant.

Or sur la scène locale, de temps en temps - en cette période "d'entrée" de notre pays au sein de l'Europe - éclatent des discussions passionnées concernant ce trait commun. Les uns l'identifient comme une sorte de vague lyrisme qui devrait être conservé, même s'ils n'arrivent pas à le définir clairement. Les autres refusent toute notion de spécificité nationale en tant que valeur posée a priori et exigent notre "intégrationé immédiate dans le contexte européen.

Discussion intéressante, certes, mais inutile, semble-t-il. Ce trait commun national, s'il y en a un, n'existe qu'à travers les manifestations individuelles, et sa nature insaisissalbe pourrait être expliquée par le fait qu'il est tissé de la même matière que la vie elle-même : dès que vous commencez à l'autopsier, elle disparaît.

Cependant, la gravure aux pays de Bohême possède ses personnalités auxquelles elle se rérère souvent. Ainsi Vaclav Hollar (1607-1677) graveur et dessinateur baroque et Vladimir Boudnik (1924-1965) graveur et expérimentateur, également auteur du personnage du roman de Bohumil Hrabal, "Le tendre Brabar". Boudnik a intitulé son programme : "La gravure active" et a donné à son concept théorique le nom de "l'explosionalisme". Par exemple, il enregistrait sur la matrice à graver les emprientes de différents instruments disponibles dans l'usine où il travailleit. Un autre fois, il a enterré ses plasue de fer pendant un certain temps, puis a imprimé "l'image" de l'oxydation laissée sur le métal. Ces oeuvres ont été intitulées "gravures exhumées". Je pense que Vladimir Boudnik est une des représentants les plus importants de la gravure asbtraite tchèque, dans toute l'histoire récente. On pourrait dire que les trois artistes repris dans cette exposition du musée Rops sont, d'une manière ou d'une autre, ses héritiers ainsi que de Hollar.

Marie Blabolilova (1948) nous montre ce qui a première vue peut apparaître léger, mais qui pour elle est substantiel : les moements précieux de la découverte d'un ordre simple des choses. A la question de savoir comment son écriture s'est développée, elle réponde : "Toutes mes gravures sont réalisées par la technique de l'eau-forte. Chaque fois que j'ai essayé une autre technique, le résultat était étrange, comme emprunté à quelqu'un d'autre. J'aime les vieux "burins" et surtout ceux de Hollar. Chaque ligne y a sa propre ligique et doit exister exactement là où elle est... Moi aussi, dans mes gravures, j'essaye  de poser les lignes de façon qu'elles expriment mon intention, de la meilleure manière possible. D'abord, je travaille chaque plaque pendant très longtemps, en rélféchissant sur l'inclinaison des lignes, leur épaisseur, leur densité. Aujourd'hui, je me suis d'autant identifiée à ce style qu'il me vient en quelque sorte automatiquement. Cependant, je me pose souvent la question de savoir s'il ne s'agit pas déjà d'une "manière" et s'il ne serait pas mieux de passer à quelque chose de nouveau. Mais après quelques essais, j'en reviens toujours à cette forme d'expression. Un écritrue personnelle, on ne l'invente pas non plus : elle se développe progressivement de soi-même, doucement comme un réflexion des qualités de l'auteur. Il en va de même pour mon travail. Je ne souhaite pas étonner le spectateur par de nouveautés. Je cherche seulement à visualiser mes sentiments de la façon la plus précise possible".

Les gravures de Alena Kucerova (1937) sont caractérisées par l'utilisation de la techique de perforation. Il est remarquable que dans un espace d'expression aussi étroit, - elle trace de petits trous au diamètre variable, souvent alignés - elle puisse parvenir à une oeuvre aussi originale et multiforme.

L'artiste s'explique ainsi : "Une tôle luisante de fer étamé, telle est la surface sur laquelle je trouve les chemins et les lieux partculiers où je me sens la plus heureuse. Je ne commence à travailler sur la matrice qu'après une longue réflexion, en puisant mon inspiration dans les paysages environnat Stara Boleslav, cette région où vous pouvez découvrir, comme perdues dansles champs et les forêts, les statues baroques du célèbre M. Braun. C'est mon pays.

Jusqu'en 1981, j'ai employé la technique de "perforation" qui me contraignait d'une certaine manière à réduire les possibilités formelles. Plus tard, j'ai commencé à modeler la matrice comme un relief, pour obtenir des valeurs plus fines. Maintenant, je combine les deux techniques. Souvent, il me suffirait de façonner uniquement la matrice, sans en imprimer l'estampe. Néanmoins, je l'imprime. "

Les gravures de Ondrej Michalek (1947) sont tout autant intéressantes par l'originalité des moyens mis en oeuvre, - inclusion d'éléments métaliques torsadés dans la matrice du linoléum - et par l'intensité de l'expression poétique qu'il parvient à en dégager.

"J'ai toujours été intéressé par les possibilités de transfert d'une structure tri-dimensionnelle vers une image bi-dimensionnelle. C'est pourquoi je préfère la technique de collographie qui permet de travailler non pas sur les "moyen d'illusion" mais sur l'empreinte directe. J'emploie habituellement plusieurs surimpressions d'encre blanche sur fond noir. Il est presqu'impossible de décrire comment naît une oeuvre, ce qui traverser le cerveau de l'artiste, ce qu'il biffe ou ajoute, et quand il considère le travail terminé. En ce qui concerne l'oeuvre existe quand elle commence à me communiquer (ou me dissimuler, ce qui revient au même) des histoires qui peuvent réciproquement se contredire."

Ondrej Michalek

Claude Sinte

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